De la maltraitance aux violences gynécologiques et obstétricales

Depuis plusieurs semaines, la mise en cause d’un professeur de renom a mis en lumière les violences gynécologiques et obstétricales, obligeant la profession à réagir rapidement (et tardivement). Cette prise de conscience s’inscrit dans la continuité d’un combat mené depuis longtemps par les sages-femmes.

Les violences gynécologiques et obstétricales, une situation appelée à évoluer

Dénoncées depuis des années par des femmes de plus en plus nombreuses, les violences gynécologiques peuvent résulter de tous les professionnels de santé, depuis le gynécologue obstétricien jusqu’à la sage-femme, en passant par l’aide-soignante ou encore l’anesthésiste. Pouvant intervenir à tout moment de la vie d’une femme, bien que la très grande majorité des témoignages recueillis concerne la grossesse et l’accouchement, ces violences gynécologiques et obstétricales se caractérisent par de multiples formes, comme des paroles malveillantes et / ou infantilisantes, soins prodigués sans explication et sans demande préalable, non-respect du droit des patientes (notamment en ce qui concerne le droit de refuser les soins), ….

Si la très grande majorité des sages-femmes libérales et hospitalières mais aussi des soignants de manière générale respectent scrupuleusement les règles déontologiques, la parole pour dénoncer ces violences se libère de plus en plus ces dernières semaines, suite à la mise en cause du professeur Emile Daraï de l’hôpital Tenon (Paris 10ème). Et la fondatrice du collectif Stop aux violences obstétricales et gynécologiques (Stop VOG), Mme Sonia Bisch, se félicite de cette libération :

« Actuellement, il y a vraiment besoin d’un #MeToo de la gynécologie. Il y a l’inversion de la culpabilité encore, dès qu’elles (ndlr, les femmes) subissent des violences, on ne les écoute pas. Et il y en a tellement. Donc oui, on peut dire qu’il y a un #MeToo de la gynécologie qui commence et tant mieux parce que ça fait des années que la parole des femmes est étouffée »

Un #MeToo de la gynécologie pour faire évoluer une situation jugée condamnable

Le Collège national des gynécologues et obstétriciens Français (CNGOF) n’a pu que constater la multiplication des témoignages de femmes, attestant de l’ampleur (insoupçonnée) de la situation. Il lui a fallu réagir pour répondre aux demandes d’explications et aux attentes de solutions pour que de telles violences ne soient plus possibles à l’avenir. Le 21 octobre dernier, le CNGOF a donc publié une    .

Bien que la majorité des professionnels concernés affirme déjà respecter cette charte, cette dernière a au moins le mérite de préciser toutes ces règles, qui étaient, jusque-là, uniquement orales. Cela permet aussi à la profession de rappeler les deux socles essentiels de ces consultations : le respect et la bienveillance. Bien que Mme Bisch admette que cette publication est un premier signe encourageant, elle invite les autorités publiques à aller encore plus loin : « Si on pouvait répondre aux violences avec une charte, ce serait facile. Davantage que des mots, il faut aujourd’hui des actes. »

Des violences gynécologiques à la maltraitance, la mobilisation sans faille des sages-femmes

Mais, ces violences gynécologiques et obstétricales ne s’arrêtent pas à ces seuls cas de violences manifestes, et les sages-femmes savent de quoi elles parlent.  En effet, alors qu’elles sont censées accompagner les femmes tout au long de leur vie, les sages-femmes dénoncent depuis longtemps la maltraitance « institutionnelle », dont elles sont coupables au quotidien. Ce n’est certes pas sur le même registre que l’action entreprise par le CNGOF, mais lorsqu’en novembre dernier, Anna Roy, sage-femme libérale et hospitalière, lançait un cri d’alarme sur les réseaux sociaux.

« Quand lors d’une garde vous avez 3 femmes en travail plus les urgences à gérer, vous êtes dans la maltraitance. »

Son appel devenait vite viral, et depuis les témoignages affluent sous les hashtags #jesuismaltraitante, #jesuismaltraitant et #noussommesmaltraitées. Maltraitantes et maltraitées, voilà en grande partie pourquoi les sages-femmes se mobilisent depuis plusieurs mois pour dénoncer ce manque criant de moyens. Si les sages-femmes ont été nombreuses à témoigner et à apporter leur contribution au mouvement, de nombreuses femmes ont tenu elles-aussi à confirmer cette maltraitance, dont elles se disent avoir été victimes. La prise de conscience du CNGOF donnera-t-il plus de poids à cet appel des sages-femmes ? Car après tout, les deux actions se rejoignent dans leur finalité : garantir des soins plus bienveillants et assurer une prise en charge respectueuse pour toutes les femmes.

Pensez-vous, que la prise de conscience est suffisante pour que la situation évolue rapidement ? Estimez-vous, que les revendications anciennes des sages-femmes ne tomberont pas dans l’oubli ?