Des sages-femmes trop peu nombreuses et mal réparties ?

Pour les sages-femmes, le manque de personnel est de plus en plus problématique, et ce danger pour la santé des femmes est exacerbé dans certains territoires par des problèmes de répartition des professionnelles. En Ile de France, par exemple, les sages-femmes tirent la sonnette d’alarme.

La répartition des sages-femmes sur le territoire, une question de santé publique

Depuis plusieurs mois, les sages-femmes revendiquent et demandent aux autorités sanitaires le recrutement massif de nouvelles recrues, dénonçant un sous-effectif permanent. Non seulement, cette pénurie de sages-femmes dégrade considérablement les conditions de travail des maïeuticiennes, mais elle met en danger, selon de nombreuses professionnelles, la santé même des patientes.  Depuis la fin de l’année 2020, les sages-femmes dénoncent cette réalité à travers l’hashtag #noussommesmaltraites en demandant l’application du principe « Une femme = une sage-femme ». Qu’elles exercent sous forme libérale ou qu’elles s’activent dans une maternité, les sages-femmes font de la hausse des effectifs une condition incontournable pour améliorer la prise en charge des femmes.

Bien que les autorités publiques aient déjà fait savoir, que ces demandes avaient été entendues, il faudra de nombreuses années avant de pouvoir les satisfaire. Aussi la question de la répartition des sages-femmes sur le territoire représente un enjeu majeur pour pouvoir réagir au plus vite. Le Conseil National de l’Ordre des Sages-Femmes (CNOSF) tient à jour les données démographiques de la profession. Du nombre de sages-femmes par naissance au nombre de sages-femmes libérales par femme, ces études soulignent une grande disparité. Certains territoires souffrent non seulement d’une pénurie de professionnelles mais aussi d’un manque d’infrastructures, que ce soit en termes de maternité ou même de maison de naissance. Ainsi, si la densité moyenne de sages-femmes libérales par femme ((nombre de sages-femmes libérales / nombre de femmes de 15 à 49 ans) *100.000) en France est de 45, elle n’est que de 19 dans le département de l’Orne. Pour pallier ces disparités territoriales, des dispositifs restrictifs pour l’installation d’une sage-femme en zone considérée comme surdotée ont été mis en place. Mais la situation n’est à ce jour toujours pas satisfaisante pour certaines régions de l’Hexagone, à commencer par l’Ile de France.

Paris et l’Ile de France, un désert médical en devenir ?

On pense, en évoquant le problème de la désertification médicale, à des territoires reculés, et pourtant, les sages-femmes d’Île de France lancent depuis plusieurs semaines un véritable cri d’alarme. L’inspection générale des affaires sociales (IGAS) s’est même saisie du dossier, et un rapport devrait prochainement être publié sur cette question. On compte en moyenne en France 150 sages-femmes pour 100.000 femmes alors qu’elles ne sont que 129 en région Ile de France, ce qui en fait la région la moins dotée en professionnelles. Et les maternités de la région peinent à recruter avec des situations délicates dans certains établissements. Sur les 3864 sages-femmes d’Ile de France recensées en 2020, 744 sont libérales soit 19.25 %. Et les prospectives laissent entrevoir une hausse conséquente de cette proportion, puisque les études soulignent qu’en 2030, une sage-femme sur 3 en Ile de France serait libérale. Et pourtant, il faudra bien pour les professionnelles présentes aujourd’hui accompagner les 50.000 naissances prévues au cours de cet été. Et les contraintes de l’hôpital ne permettent de voir la situation s’améliorer dans un avenir proche. Et la situation devient urgentissime sur certains territoires. Ainsi, interrogée par les journalistes du Figaro, une sage-femme du CHU de Créteil reconnaissait : «Je n’en peux plus, je suis en permanence épuisée. Nous sommes en sous-effectif depuis deux ans, il nous manque une dizaine de sages-femmes en temps plein ». Et cela se ressent pour une grande partie des maïeuticiennes, puisque l’étude de 2020 du Collège National des Sages-Femmes établissait que 40 % des sages-femmes hospitalières et 31 % des sages-femmes libérales étaient en situation d’épuisement professionnel (burn-out). Et ces moyennes, elles, ne tiennent pas compte des spécificités de ces territoires encore plus touchés.

Et vous, considérez-vous votre lieu d’exercice comme sur-doté ou sous-doté ? Pensez-vous que les problèmes démographiques de la profession vont s’améliorer dans les années à venir ? Comment ?