La privatisation des soins, un fantasme ou une menace réelle ?

C’est une menace souvent brandie tant par les sages-femmes que par tous les autres soignants. Régulièrement, ces accusations de privatisation des soins soulignent les évolutions d’un système de santé, que de plus en plus de soignants jugent défaillant.

La privatisation du système de santé, une inquiétude pour tous les soignants !

C’est un sujet, qui concentre les débats depuis quelques semaines, alors même que l’élection présidentielle devait permettre de réfléchir et de se concerter sur les évolutions à venir pour notre système de santé. De nombreux soignants, issus tantôt de l’hôpital tantôt de la médecine de ville, alertent l’opinion publique sur la lente et inexorable privatisation des soins mais aussi et surtout sur ses conséquences. Les sages-femmes libérales ou hospitalières rejoignent, pour certaines d’entre-elles, ces contestataires. Le dernier exemple en date concerne la société Ramsay France, le leader de l’hospitalisation privée en France. Affichant désormais de nouvelles ambitions, dont celle de de devenir « (…) la référence en matière de soins primaires (…) », la filiale du groupe australien Ramsay Health Care s’est donc lancée dans la création de 5 centres de santé mais aussi dans le rachat de 6 centres de santé de la Croix Rouge Française en Ile de France.

Si certains s’effraient du modèle organisationnel, inspiré de l’exemple suédois, d’autres dénoncent la captation de patientèle. C’est ce malaise grandissant, qu’exprimait la présidente de la FNCS (Fédération Nationale des Centres de Santé), le Dr Hélène Colombani en déclarant :

Ramsay Santé va-t-il devenir un acteur de la solidarité et œuvrer en faveur de l’accès de tous à la Santé ou va-t-il juste faire du business et se servir des centres comme porte d’entrée vers ses cliniques ?

Les sages-femmes en première ligne pour défendre une santé plus efficiente

D’un côté, les soignants préviennent du danger de voir ces entreprises (Ramsay France n’est pas la seule à investir dans les soins primaires en France) privilégier la rentabilité à la Santé publique. De l’autre, les cadres de Ramsay France s’efforcent de rassurer en soulignant leur expertise et leur expérience, au niveau mondial, en la matière. Il serait illusoire de vouloir lister toutes les problématiques, que soulèvent cette privatisation. En revanche, le manque de moyens financiers, matériels et humains figure toujours en bonne place dans les craintes, exprimées par les soignants et les spécialistes du secteur de la Santé.

Ne retrouve-t-on pas là les principales revendications, qui mobilisent les sages-femmes libérales et hospitalières depuis des mois, voire des années ? Un manque de moyens financiers (revendication d’une revalorisation salariale) et humains (« Une femme, une sage-femme ») n’explique-t-il pas en grande partie les manifestations organisées par les sages-femmes ? Certes, les questions ne sont pas exactement les mêmes, et pourtant ….

Éviter le délitement progressif d’un système de santé déjà en place

Car toutes les décisions prises, en matière de santé publique, entraînent des conséquences visibles sur le moyen ou le long terme. N’est-ce pas ce que nous rappelle les récentes révélations sur la dégradation du taux de mortalité infantile en France depuis une dizaine d’années ? Les études confirmeront ou infirmeront certaines accusations portées au moment de ces révélations, notamment celle liant cette dégradation à la fermeture constante des maternités. (Selon l’Enquête nationale périnatale réalisée en 2016, 27 % des maternités en France relèvent du secteur privé. Elles accueillent 25 % des naissances).

Et surtout, les sages-femmes revendiquent leur mission de référente en matière de santé des femmes, et toutes les revendications plaident en ce sens. Elles s’effraient ainsi des conséquences qu’a pu engendrer la privatisation des soins aux personnes âgées dépendantes avec le scandale Orpéa et refuse que les femmes et les nourrissons en soient les prochaines victimes.   N’est-ce pas déjà cette mise en garde, qu’ont lancé 3 médecins spécialistes de la protection maternelle et infantile (PMI) dans les colonnes du journal Le Monde ?

Et vous, considérez-vous qu’il soit encore temps de lutter contre cette privatisation des soins en France ? Comprenez-vous et partagez-vous ces craintes au vu de l’évolution lente de notre système de santé ?