L’avenir de la périnatalité et des sages-femmes en question ?

Depuis plusieurs mois, les sages-femmes se mobilisent pour dénoncer une dégradation continue de leurs conditions de travail. En cette rentrée 2022, la situation est même présentée comme intenable. Les autorités publiques en ont-elles pris conscience ?

La rentrée 2022 des sages-femmes, une continuité ou une révolution ?

Déjà en 2021, les soignants hospitaliers et libéraux en général et les sages-femmes en particulier soulignaient l’urgence de transformer en profondeur notre système de santé. Depuis le début de l’année 2022, ces appels à l’action se multiplient et en cette rentrée 2022, tous attendent des décisions concrètes de la part des autorités publiques, et notamment du ministère de la santé. Cette nécessaire transformation du système de santé fait partie des priorités du gouvernement, qui a d’ores et déjà annoncé préparer une grande concertation de tous les acteurs concernés. Pour les sages-femmes, les arguments avancés seront les mêmes que ceux qui ont mobilisé la profession depuis des mois et qui n’ont, jusque-là, entrainé aucune réaction concrète.

Si la restriction d’accès à certains services d’urgence a fait couler beaucoup d’encre, la « fermeture partielle » de nombreuses maternités a été largement moins médiatisée au cours de l’été 2022. Pourtant, faute de personnel suffisant et notamment de sages-femmes hospitalières, certains établissements ont dû recentrer l’essentiel de leurs activités sur les salles de naissance, quitte à délaisser certaines de leurs autres missions (suivi des femmes enceintes, Interruption volontaire de grossesse, …). La période estivale est passée, mais la situation ne s’est pas améliorée. La rentrée 2022 s’annonce encore plus complexe tant dans les maternités que pour les sages-femmes libérales.

Un constat dramatique connu appelant à une réaction immédiate   

Est-il nécessaire de rappeler les chiffres, qui amenèrent certains professionnels de santé à un appel à l’aide pour les maternités au début de l’été ? Dans le seul département de Seine Saint Denis, ce n’était pas moins de 175 équivalents temps plein, qu’il manquait dans les maternités soit la moitié des effectifs de sages-femmes. Toutes les régions et toutes les maternités sont concernées à un degré plus ou moins intense. Et en 2022, les maternités ne peuvent pas compter sur le secteur libéral pour absorber a la surcharge de travail, née de ces dysfonctionnements et de ces carences. Le conseil national de l’Ordre des sages-femmes s’était du reste alarmé, au début de l’été, face aux difficultés pour les sages-femmes libérales de trouver des remplaçantes pour cette période estivale. Sage-femme libérale ou sage-femme hospitalière, la situation est qualifiée de critique voire dramatique. Quand accompagner les femmes au quotidien devient une source de violence pour les maïeuticiennes, la perte de sens et / ou de vocation devient la règle. Au 1er semestre 2022, le nombre de radiations de sages-femmes en exercice a augmenté de …112 %.

Un cercle vicieux mortifère pour la profession de sage-femme ?

 Les sages-femmes quittent ainsi leur profession, aggravant un peu plus la situation. Dans ces conditions, doit-on s’étonner de la dégradation des indicateurs de périnatalité ?  Il y a donc urgence à agir avant que la situation ne devienne ingérable. C’est le cri d’alerte qu’a lancé la présidente du Conseil National de l’Ordre des Sages-femmes (CNOSF), Mme Isabelle Derrendinger :

« Sans un choc d’attractivité immédiat et puissant, le système périnatal peut s’effondrer (…) »

Ce choc « immédiat et puissant » est-il prévu, par les autorités publiques, en cette rentrée 2022 ? On peut en douter, puisqu’à l’occasion du Ségur de la Santé en juin 2020, le CNOSF avait déjà alerté les autorités en leur faisant savoir que 55 % des sages-femmes libérales et hospitalières envisageaient à l’époque de quitter la profession. Un constat, qui n’a pas eu les effets escomptés et qui n’a pas impliqué des décisions à la hauteur de la gravité de la situation. Septembre 2022 sera-t-il différent ?

Pensez-vous que le ministère de la santé a conscience de l’urgence de la situation ? Pensez-vous que ces départs de sages-femmes vont s’amenuiser ou qu’au contraire la tendance va s’amplifier ? Quelles seraient, selon vous, les décisions prioritaires à prendre ?