Au cours de l’été, une tribune publiée dans le journal Le Monde a suscité la colère et l’indignation de nombreuses sages-femmes. L’une d’entre-elles, Mme Claudine Schalck, a même pris la plume pour faire connaître sa position, qu’elle entend partager avec l’ensemble de la profession.
Une sage-femme prend la plume pour défendre la profession de sages-femmes
C’est une querelle, qui a pu passer inaperçue en cette saison estivale, mais qui suscite des réactions sur les forums et les réseaux spécialisés en cette rentrée. Le 28 juillet dernier, Israël Nisand, ancien président du Cngof (Collège National des gynécologues et obstétriciens français) publiait une tribune dans les colonnes du journal Le Monde (« Aujourd’hui, nous en sommes rendus à ne plus avoir assez de sages-femmes pour faire les accouchements »). C’est en réaction à ce texte que Claudine Schalck, sage-femme et psychologue clinicienne, a elle-aussi pris la plume pour réagir assez vivement au premier texte cité.
S’offusquant que le professeur émérite de gynécologie obstétrique puisse écrire « en lieu et place des sages femmes », Mme Claudine Schalck réagit à certaines prises de position de celui-ci. Certes, elle partage le constat initial, en expliquant cette pénurie de sages-femmes notamment par la fermeture continue des maternités mais aussi par la transformation des autres maternités en « usines à accoucher ». En revanche l’explication de cette pénurie incontestable avancée par M Nisand provoque l’indignation de la sage-femme. En évoquant le texte rédigé par l’ancien président du Cngof, l’auteure souligne ainsi qu’ » il entend rendre celles-ci coupables de ne penser qu’à leur confort en faisant valoir leurs « droits » plutôt que leurs « devoirs ».
Des droits et des devoirs pour les sages-femmes libérales
Mme Schalck reproche à M Nisand de faire peser cette responsabilité sur les sages-femmes libérales notamment. Elle conteste vivement ses propos qu’elle cite in extenso :
« Il faudrait que les sages-femmes soient tenues de pratiquer pendant un temps minimal ce pour quoi elles ont été formées (…). Créons un stage interne des sages-femmes sur une durée de deux fois six mois dans deux maternités différentes, rémunéré par l’Etat à hauteur de 2 000 euros brut. »
C’est donc parce qu’elles choisiraient de devenir sages-femmes libérales, que les maternités seraient en danger aujourd’hui. Mme Schalk reprend chacun des points avancés par l’auteur de la première tribune, et souligne que la situation actuelle découle de décennies de politiques de périnatalité, influencées par le seul monopole des gynécologues obstétriciens. Elle dénonce cette approche et ses conséquences comme cette « idée de la grossesse comme potentiellement pathologique ». Outre « cette pathologisation de la maternité et du corps des femmes », Mme Claudine Schalck dénonce vivement les ambitions publiques de vouloir imposer l’accouchement à la maternité quitte à écarter l’accouchement assisté à domicile, les maisons de naissances, … des lieux gérés et dirigés par des sages-femmes. Non seulement, ces idées ont conduit, selon l’auteure, à la situation que l’on connait aujourd’hui mais elles participent également à ce manque de reconnaissance en ce qui concerne les compétences des sages-femmes. Tout cela conduit l’auteure à s’interroger publiquement :
Aussi pourquoi choisiraient-elles de travailler, main-d’œuvre bon marché, sous férule médicale ou administrative, et a fortiori d’être formées sous contrainte pour exercer une médecine forcée à l’endroit des femmes ?
C’est donc une véritable passe d’armes, que se sont livré les gynécologues obstétriciens et les sages-femmes par presse interposée. Mme Schalck condamne vivement cette volonté d’imposer un « ordre médical et patriarcal », un état d’esprit incompatible selon elle avec la vocation même des sages-femmes :
Le cœur du métier de sage-femme n’est pas la gestion de la pathologie mais le partenariat avec les femmes dans leurs compétences corporelles, avec la physiologie, ainsi que la gestion de leur bonne santé, à la fois physique, mentale et sociale
Comment jugez-vous cette opposition ? Que pensez-vous des propos de Mme Schalck ? Vous retrouvez-vous dans les positions défendues dans cette tribune ?