Les sages-femmes libérales majoritaires dans quelques années ? 

Plus d’une sage-femme sur 3 en France est une sage-femme libérale. Elle n’était que 19 % en 2011. Seront-elles 50 % en 2031 ? La question se pose et soulève bien des inquiétudes.

Devenir sage-femme libérale en 2023, une vocation ou un choix par défaut ?

On comptait en 2011 3751 sages-femmes libérales, ce qui représentait alors 19 % de la profession. 10 ans plus tard, la France enregistre 7500 sages-femmes libérales, soit un doublement de l’effectif. Aujourd’hui les maïeuticiennes, ayant choisi la voie de l’exercice libéral, représentent 34 % de la profession.

Plus d’une sage-femme sur 3 en France est sage-femme libérale.

Si 2020 et 2021 ont marqué un statu quo, crise sanitaire oblige, depuis le début de l’année 2022, les acteurs de la santé alertent sur une accélération de cette tendance de fond. Non seulement, les étudiantes et étudiants obtenant leur diplôme sont de plus en plus nombreux à préférer l’exercice libéral, on constate également le départ de sages-femmes hospitalières pour tenter l’aventure du libéral. Les annonces du ministère de la santé, les promesses des autorités sanitaires n’ont pas réussi à apaiser une colère, que les sages-femmes expriment pourtant depuis de nombreuses années. Certains alertent sur le danger de cette situation et prédisent que les prochains mois pourraient représenter un véritable point de bascule, terminant d’éloigner définitivement les maïeuticiennes de la pratique hospitalière.

Dans tous les cas, tous les acteurs concernés tentent d’apporter des réponses concrètes pour sortir de cette urgence vitale pour la santé des femmes. Car, dans le même temps les compétences des sages-femmes ont été élargies, notamment pour compenser la pénurie de médecins et de gynécologues. A peine devenues essentielles et centrales dans l’organisation de la périnatalité en France, les sages-femmes font déjà défaut en nombre. Les sages-femmes libérales sont devenues la seule variable d’ajustement, avec laquelle les maternités peuvent encore trouver des solutions à des situations d’urgence.

Sage-femme libérale ou hospitalière, une même profession ?

Sage-femme retraitée, ayant exercé à l’hôpital et en libéral, Mme Dominique Barranger-Adam dénonce cette situation et fustige ceux, qui en donnent une vision erronée, en expliquant dans le magazine Profession Sage-Femme :

Attaché à un système hospitalier sous le contrôle exclusif des gynécologues-obstétriciens, le Pr Nizan a commis une tribune dans Le Monde tentant d’opposer sages-femmes hospitalières, et plus généralement salariées, aux libérales qui bénéficieraient de conditions de travail et de rémunérations enthousiasmantes. Évidemment, on en est loin ! Ce serait selon lui cette séduction perverse qui expliquerait la désertion des sages-femmes hospitalières, plus que leurs conditions de travail et leur manque de reconnaissance ! Diviser pour mieux régner…

Pour elle comme une grande partie des spécialistes et observateurs du domaine de la périnatalité, on ne peut pas expliquer l’augmentation significative du nombre de sages-femmes libérales par les seules conditions de travail indignes dans les maternités et les hôpitaux publics. Mais on ne peut pas plus justifier cette évolution structurelle de la profession par les conditions « enthousiasmantes » qui caractériseraient le quotidien de ces sages-femmes libérales. Pourtant la tendance est connue et tend à s’accélérer ces dernières années. Devenir sage-femme en 2023 devrait encore traduire cet « engouement » pour l’exercice libéral au détriment bien évidemment d’une carrière hospitalière.

Il serait trompeur de ne pas évoquer le choix volontaire et affiché pour une carrière de sage-femme libérale. Toutes les sages-femmes libérales de France ne le sont pas par dépit bien au contraire. L’exercice libéral continue d’attirer de nombreuses vocations, même si elles sont de plus en plus nombreuses à souligner, là aussi, la dégradation des conditions de travail et de rémunération. Si le gouvernement a déjà dévoilé les mesures, qui seront déployées au cours des prochaines années, pour former davantage de sages-femmes, il faudra aussi d’ici là réussir à créer et renforcer l’attractivité de la carrière hospitalière, sous peine de voir encore la part des sages-femmes libérales augmenter …

Et vous, pensez-vous que l’exercice libéral va continuer à progresser dans la profession ? Que conseilleriez vous à une étudiante de 2022 souhaitant devenir sage-femme ?