L’accouchement à domicile, des sages-femmes libérales persécutées ?

Alors que la situation exceptionnelle de l’année 2020 s’est traduite par une hausse importante de demandes d’accouchements à domicile, les sages-femmes spécialisées dans ce domaine se disent persécutées par un système hospitalier tout-puissant.

La crise sanitaire a remis l’accouchement accompagné à domicile au goût du jour

C’est au printemps dernier, que le confinement, décidé pour juguler la crise de coronavirus, a redonné des couleurs à l’accouchement accompagné à domicile (Aad). En effet, ce confinement a amené de nombreuses maternités à refuser l’accès aux pères, venus assister à l’heureux événement.

De nombreuses femmes, déjà angoissées par la situation sanitaire du pays, ne pouvaient pas imaginer rester seule au cours de cet heureux évènement. C’est ainsi, que les demandes de parturientes d’accoucher chez elle se sont multipliées. Des demandes d’information, des questions orientées, …. Les sages-femmes libérales ont bien ressenti ce nouvel engouement, qui a marqué un arrêt lors du déconfinement.

Mais depuis le 30 octobre, la situation s’inverse à nouveau, même si la demande est moins importante au vu des mesures plus souples imposées pour ce second confinement. Les maternités autorisent l’accès aux pères, la situation sanitaire est moins « hors de contrôle » qu’au printemps, …

Répondant aux questions des journalistes du Monde, Floriane Stauffer-Obrecht, sage-femme libérale et activiste au sein de l’Apaad (Association professionnelle de l’accouchement accompagné à domicile) confirme cette situation :

« Elles étaient quatre à cinq fois supérieures lors du premier confinement. Elles sont aujourd’hui au moins deux fois plus nombreuses qu’en temps normal »

Une reconnaissance pour les sages-femmes spécialisées dans l’Aad ?

Si ce constat fait suite à la situation exceptionnelle qu’a connu la France au cours de cette année 2020, doit-on y voir une reconnaissance pour les quelques dizaines de sages-femmes spécialisées dans cet accouchement domicile. Rien n’est moins sûr, et le simple constat des chiffres le conforte. On recense ainsi, chaque année, entre 1000 et 3000 accouchements à domicile, un chiffre peu représentatif au regard des quelques 800.000 accouchements enregistrés annuelle dans l’Hexagone.

Il faut dire, que depuis la consécration de l’hôpital public (dans les années 1950 – 1960), l’Aad a été marginalisé par les autorités publiques. Les décideurs en matière de Santé Publique ont réussi à convaincre les femmes de préférer l’hôpital à l’accouchement à domicile. Un cadre pensé pour la santé des mères et de leurs nourrissons, des professionnels de santé formés à toutes les situations, des traitements (péridurale, …) adaptés, … les arguments ne manquaient pas, et la baisse spectaculaire du taux de mortalité infantile a fini de faire de l’accouchement à l’hôpital la règle générale, choisie par la quasi-totalité des futures mamans. Pour autant, certaines sages-femmes défendent l’accouchement à domicile, le présentant comme une véritable alternative à ces « accouchements standardisés et industrialisés ».

Une position défendue par des sages-femmes libérales engagées

Le débat ressurgit de manière régulière sur le devant de la scène, et en 2017, la libération de la parole des femmes sur les « violences obstétricales » avait permis de vanter les avantages et les vertus de cet accouchement à domicile. Les sages-femmes libérales spécialisées en la matière se transmettent leur savoir, décrivant leur approche comme bien plus personnalisée et plus douce. Si aucun texte de loi n’interdit l’accouchement à domicile, ces professionnelles se déclarent victimes d’une véritable « chasse aux sorcières ».  La loi autorise l’accouchement à domicile, qui sera facturé à la sage-femme au même montant que celui réalisé en maternité (313.60 €), mais la pensée dominante laisse planer le doute quant à la sécurité de cette méthode.

Pourtant, une étude publiée par la revue scientifique The Lancet en 2019 apportait une conclusion bien différente :

« Le risque de mortalité périnatale ou néonatale n’était pas différent quand l’accouchement était prévu à la maison ou à l’hôpital. »

Pour renforcer leur argumentation, les sages-femmes expliquent aussi l’impossibilité, pour elles, de s’assurer pour leur pratique professionnelle. Des primes correspondantes de plus de 22.000 € obligent ces sages-femmes à exercer sans assurance professionnelle et donc à assumer personnellement toute erreur ou toute faute.

La situation évoluera-t-elle après cette crise sanitaire majeure. Les sages-femmes libérales concernées veulent y croire, même si elles redoutent que cela ne suffira pas à atténuer la surveillance draconienne de la part de leur ordre professionnel, dont elles se disent victimes.

Et vous, que pensez-vous de cette situation ? Estimez-vous que le regard porté sur l’accouchement à domicile doive évoluer ?

3 commentaires sur « L’accouchement à domicile, des sages-femmes libérales persécutées ? »

  1. Les femmes doivent pouvoir choisir et les sages-femmes doivent pouvoir s’assurer à un.prix raisonnable

  2. De nombreuses femmes se rendent compte de l’infantilisation dont elles peuvent être l’objet lors d’un parcours obstétrical en maternité, ainsi que du manque de moyen humain au sein des équipes. La volonté de certaines de ces femmes à devenir davantage active (physiquement mais aussi psychiquement par le fait de faire un choix éclairé, de se positionner) lors de la venue au monde de leur enfant devrait être encouragé. Et les sages femmes prêtes à accompagner ces couples devraient voir leur exercice reconnu et soutenu, par une rémunération juste et prenant en compte toute la disponibilité qu’elles accordent à cet accompagnement. Le conseil de l’Ordre a aussi un rôle capital auprès des assureurs, pour que l’accès à des conditions de travail sereines ne soit pas inabordable.

  3. Lafaye -Amiotte | 27 novembre 2020 à 19 h 57 min |

    Personnellement sage-femme libérale je suis contre l accouchement à domicile, pour continuer à faire des accouchements ( et ce depuis 29 ans ) j ai conservé un temps partiel de sage-femme salariée

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